Roland Barthes est sémiologue et écrivain. Petit tour en cinq livres d’une œuvre immense.
Roland Barthes est né en 1915, à Cherbourg. Il connait une enfance marquée par des problèmes de santé et plusieurs séjours en sanatorium. Après des études au lycée Montaigne puis au lycée Louis-le-Grand, il obtient sa licence en philosophie à la Sorbonne. Directeur d’études à l’EHESS puis enseignant au collège de France, il est renversé le 25 février 1980 par une camionnette alors qu’il se rend au Collège de France pour donner son cours. Il décède quelques semaines plus tard, le 26 mars.
L’œuvre de Roland Barthes est polymorphe et aura marquée toute une époque. Puisant ses sources d’inspiration aussi bien dans le mouvement structuraliste que dans les écrits de Marx et de Freud, ses travaux sont structurés notamment autour de deux déterminations: une critique idéologique du langage de la culture dite de masse et un démontage sémiologique de ce langage. Il s’agit de dissocier le signifiant – le mot, la phrase – du signifié – le sens – et d’analyser et dévoiler leurs interactions.
Roland Barthes a contribué au renouvellement de la pensée critique littéraire et artistique
Barthes, le sémiologue, est aussi attentif aux symboles et aux comportements sociaux. Une partie de ses travaux porte sur la notion de mythe, ancien ou moderne. Dans son ouvrage Mythologies il démasque les faux-semblants de la société des années 1950. Rigoureuse analyse des petites aliénations produites par les images et les objets envahissants la vie quotidienne, sa démarche est marquée par la nuance et son écriture fragmentée, « parce que, comme il l’écrira, l’incohérence est préférable à l’ordre qui déforme ». Figure majeure de la nouvelle Critique, Barthes a contribué par ses travaux au renouvellement de la pensée critique littéraire et artistique.
Le degré zéro de l’écriture (1953)
Publié en 1953 aux éditions du Seuil, Le Degré zéro de l’écriture est le premier livre de Roland Barthes, qui ne s’était fait connaître jusqu’alors que par des articles donnés aux Lettres nouvelles, à France-Observateur, Esprit ou encore Combat. C’est d’ailleurs dans ce dernier journal que Barthes a fait paraître, en août 1947, l’un de ses tout premiers textes, déjà intitulé Le Degré zéro de l’écriture, dont l’ouvrage de 1953 ne conserve que le titre et quelques lignes de l’introduction. Les dix chapitres sont, eux, soit des inédits, soit des refontes et développements d’articles publiés également dans Combat, d’abord en septembre 1947, puis en novembre et décembre 1950. À sa sortie, le livre reçut un accueil plutôt favorable. Il est demeuré depuis lors emblématique de ce qu’on nommera, quelques années plus tard, « la nouvelle critique ».
Mythologies (1957)
Au travers de la DS, du bifteck-frites, du strip-tease ou du plastique, les Mythologies ne sont pas seulement un formidable portrait d’une France entrant, avec les années 50, dans la culture de masse moderne, elles sont aussi l’invention d’une nouvelle critique de l’idéologie : d’une part celle-ci ne loge pas dans les grandes abstractions mais dans les objets les plus quotidiens, d’autre part elle n’appartient pas au monde des idées, elle est d’abord langage, ou plus précisément un certain système de langage que seule une sémiologie – une science des signes – est en mesure de décrypter.
L’Empire des signes (1970)
D’un voyage au Japon, en 1970, Roland Barthes a rapporté un livre somptueux : L’Empire des signes. Un livre sur le Japon ? Pourquoi le Japon ? Parce que c’est le pays de l’écriture : le signe japonais est admirablement réglé, agencé, affiché, jamais naturalisé ou rationalisé. Et surtout, la qualité supérieure de ce signe, la noblesse de son affirmation et la grâce érotique dont il se dessine sont apposées partout, sur les objets et sur les conduites les plus futiles, celles que nous renvoyons ordinairement dans l’insignifiance ou la vulgarité.
La chambre claire (1980)
Barthes s’interroge ici non seulement sur la nature de la photographie mais fournit également quelques concepts sur le « génie propre », de ce moyen de représentation. L’auteur expose l’interaction entre l’opérator (le photographe), le spectator, et le spectrum (ce qui, celui qui est photographié). Barthes aborde la question de ce qui est montré par la photographie, « de l’air » et de l’identité saisis, des images désormais consommées en lieu des croyances.
L’Aventure sémiologique (1985)
Roland Barthes a été aussi un chercheur au plein sens du terme, un de ceux qui, après Saussure et Greimas, ont fondé la sémiologie. Ce sont les travaux où il pose les assises de cette discipline nouvelle qui sont ici réunis, et notamment Eléments de sémiologie, L’Ancienne Rhétorique, Introduction à l’analyse structurale des récits. Autant de textes proprement fondateurs et auxquels toute recherche doit désormais s’adosser. On trouvera, à côté d’eux, une série de projets sur ce que pourrait être l’enquête sémiologique méthodique dans des domaines aussi divers que la réflexion sur l’objet, la publicité, l’ethnologie, l’urbanisme, la médecine. Enfin, la mise en œuvre de l’analyse structurale sur deux fragments de la Bible et sur un conte de Poe.