Supermarchés dévalisés, train bondé, fuite : un peu partout, les mêmes scènes d’affolements. Avec des agissements aussi soudains qu’irrationnels, la crise planétaire du Coronavirus réveille chez nombre d’entre nous, des comportements collectifs d’imitations et dans une certaine mesure asociaux, impulsifs, individualistes. Telle une contagion, la peur s’est transmise aussi vite que le virus. Comment expliquer ces phénomènes de paniques collectives ?
La panique collective, une « peur ensemble »
Largement documentée par les sciences sociales, la panique collective est une « peur ensemble », qui touche tout un groupe, une foule ou toute une population. A l’origine, pour L. Crocq, psychiatre des armées, professeur en psychologie, auteur de « Les Paniques collectives », il y a un déclenchement «par la perception d’un danger réel ou imaginaire». Elle se caractérise « par la régression des consciences à un niveau archaïque, impulsif et grégaire » et se traduit par des « comportements collectifs soit de sidération stuporeuse soit plus souvent de fuite éperdue, d’agitation désordonnée, de violence et même de suicide ».
Un contexte anxiogène
Phénomène universel, se renouvelant sans cesse, l’hystérie collective s’ancre dans une situation précise, dans des circonstances exceptionnelles. Pour Crocq, il préexiste à cette dynamique un contexte anxiogène, un temps où l’inquiétude monte. Le manque de conseils, d’informations, de dispositifs en capacité de rassurer, les réseaux sociaux diffusant massivement des rumeurs alarmistes ainsi que les chaînes télévisées d’information continue, renforcent considérablement cet état d’angoisse.
Mais, c’est un facteur déclenchant, un signal d’alarme, un danger réel ou imaginaire qui révèle le début de l’emballement. Cette phase de réaction annonce la contagion des comportements à l’ensemble de la foule. Puis, vient une phase de sédation, marquée par l’épuisement physique et émotionnel qui présage le retour progressif à la lucidité.
Prévenir les paniques collectives ?
Pourtant, les discours rassurants sur la croyance d’une pénurie alimentaire n’empêchent pas les populations de se ruer vers les supermarchés. C’est que la peur dans ces situations-là rend la foule hermétique, voire intolérante à n’importe quel argument rationnel, y compris celui de la mise en danger de la santé de tous.
Peut-on prévenir ces paniques collectives ? L’éducation à la responsabilité et à la sécurité, comme déjà enseignée à l’école, pourrait se révéler efficace. Selon Crocq, résister aux mouvements de panique se déroule en quatre étapes : informer sur le danger des mouvements de foule ; éduquer sur les obligations morales d’aider son prochain (entraide) ; instruction sur les comportements adéquats à adopter ; et enfin, entraînement face au danger.
Dernièrement l’ONU a déclaré que le Covid-19 était un test « pour nos systèmes, nos valeurs et notre humanité ». Cette crise sanitaire sans précédent est-elle l’occasion de réfléchir sur la possibilité de construire des sociétés plus solidaires caractérisées par de nouvelles formes d’échange et de production plus respectueuses de l’Homme et de l’environnement ?