Crées en 2015, à l’initiative de l’association HF Île-de-France, les Journées du Matrimoine font écho aux Journées du Patrimoine. Leur crédo ? « On n’est pas que des muses ! » L’association s’est donné pour objectifs de faire émerger « l’héritage des mères » et rendre visibles leurs œuvres.
Au programme des Journées 2020 qui se tiendront ce week-end, 17 événements et 35 rendez-vous gratuits. Rencontre avec Marie Guérini, coordinatrice des Journées du Matrimoine en Île-de-France et Membre du CA de HF Île-de-France. Propos recueillis par Isabelle Zenatti.
Vous organisez les Journées du Matrimoine le 19 et 20 septembre 2020. En quoi consistent ces journées ?
Marie Guérini : Au cours du week-end seront proposé.e.s du théâtre, des parcours architecturaux, lectures, performances, concert, conférences, dans des lieux divers à Paris : à la Cité Audacieuse, l’Espace des femmes Antoinette Fouque, l’Opéra Comique, la bibliothèque Marguerite Audoux, la Cité Universitaire, le Théâtre de la Reine Blanche… et à Montreuil, à Comme Vous Émoi…
Louise Michel, Alicia Gallienne, Renée Bocsanyi-Bodecher, Renée Vivien, Marguerite Audoux, Colette Magny, et Louise Farrenc, compositrice du XIXème… Autant de figures féminines emblématiques appartenant à toutes les époques et à toutes les disciplines artistiques seront évoquées dans une programmation riche et diversifiée.
Rendre visibles ces femmes artistes que l’histoire, écrite par les hommes, a oubliées
Les Journées du Matrimoine ont lieu également dans d’autres régions à travers d’autres collectifs HF en France, c’est le cas en Normandie, en Auvergne Rhône Alpes, dans les Hauts de France. D’autres associations, et plus largement, d’année en année, des initiatives nouvelles, ici et là, surgissent et s’emparent du concept pour rendre visibles ces femmes artistes que l’histoire, écrite par les hommes, a oubliées.
Ces évocations artistiques sont portées par des artistes d’aujourd’hui, autrices, comédiennes, musiciennes, chanteuses, architectes qui s’emparent avec envie de l’histoire de leurs aînées, comme un héritage essentiel à transmettre et découvrent ainsi qu’elles ne sont pas seules et pas les premières à être discriminées.
Pourquoi avoir choisi de mettre en avant Louise Farrenc pour l’édition 2020 ?
Chaque année, notre figure Matrimoine évoque un univers artistique, cette année, il s’agit de la musique classique où les compositrices sont invisibiliseés. Louise Farrenc, compositrice, pianiste et professeure de piano, la première femme à avoir écrit des symphonies et la première enseignante de musique à demander et obtenir l’égalité salariale dans les conservatoires. Une artiste de grand talent reconnue de son vivant et…oubliée. D’autres femmes musiciennes peu connues du public comme Chiquinha Gonzaga, Clémence de Granval, Cécile Chaminade, Hélène Héritte-Viardot, Germaine Taillefer… seront aussi évoquées.
Louise Farrenc, première enseignante de musique à obtenir l’égalité salariale dans les conservatoires
L’an passé, notre figure matrimoine était l’architecte Edith Girard, pionnière du renouveau architectural des années 80 et oubliée… En 2018, c’était Christine de Pizan, autrice du 14 et 15 ème siècle, la première à vivre de sa plume, oubliée… En 2017, c’était Alice Guy, la 1ère femme cinéaste de fiction, au temps du muet, elle a réalise plus d’un millier de films, avec une carrière à Hollywwod…et oubliée en France…
A quels besoins répond cet événement ? A qui s’adresse t’il ?
Les Journées du Matrimoine, événement gratuit, s’adresse au grand public comme les Journées du Patrimoine pour compléter notre héritage culturel fait du Matrimoine et du Patrimoine. Cet événement entend éveiller les consciences et montrer qu’à toutes les époques les femmes ont compté et ont permis des avancées, dans tous les domaines qu’ils soient artistiques, scientifiques…
Les livres d’histoire les ont oubliées, les livres scolaires ne les mentionnent pas ou peu. Il est urgent de les réhabiliter, de réparer une injustice et de permettre aux jeunes générations et en particulier aux filles de grandir avec d’autres modèles d’identification.
L’égalité entre les femmes et les hommes se doit de passer par la valorisation des nombreuses artistes femmes du passé
L’égalité entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture aujourd’hui se doit de passer par la valorisation des nombreuses artistes femmes du passé. Au XXIe siècle les inégalités entre les femmes et les hommes demeurent. Il faut continuer le combat vers l’égalité.
Ne pas oublier notre slogan « on n’est pas que des muses ».
Quels sont les objectifs de l’association HF Île-de-France ?
HF Île-de France a pour but le repérage des inégalités entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture. L’association se mobilise contre les discriminations et met en place des actions pour évoluer vers la parité. HF Île-de-France fait partie du Mouvement HF comptant neuf collectifs en France. Le Mouvement HF est membre titulaire au Haut Conseil à l’Egalité et fait partie du collectif » Ensemble contre le Sexisme ».
L’association contribue à l’orientation des politiques publiques et mène un travail de sensibilisation sur les disparités existantes par :
- L’interpellation des politiques (parlementaires, ministres, et institutionnel·le·s) ;
- Les partenariats avec des organismes professionnels et des tutelles ;
- L’organisation de rencontres publiques (Festival d’Avignon, Journée internationale des droits des femmes, Ensemble Contre le Sexisme, Festival Génération Égalité Voices etc.) ;
- Le lancement d’une campagne de sensibilisation sur les inégalités entre hommes et femmes dans le secteur des musiques actuelles » tu joues bien pour une fille »;
- La mise en place depuis 2015 des Journées du Matrimoine en écho aux Journées du Patrimoine.
Quels sont les futurs projets de votre association en Île-de-France ?
HF Île-de-France, après un constat chiffré terrifiant sur la place des femmes dans les Musiques Actuelles, a lancé une campagne de 9 portraits de femmes professionnelles du secteur des musiques actuelles actuelles pour dénoncer les inégalités dans ce secteur encore majoritairement masculin.
Campagne réalisée par Femmes PHOTOgraphes qui circule dans les écoles et les conservatoires à la demande et qui est l’occasion de conférences et débats sur le sujet.
Photo : JDM 2019 © Ariane Mestre