Autrice, professeur de lettres, Annie Ernaux a popularisé le mouvement littéraire de l’autofiction. Entre analyse et observation de ses contemporains, l’écrivaine a publié une vingtaine de livres. Le Nobel de littérature lui a été décerné le 6 octobre 2022 pour le « courage » de son œuvre, autobiographique, universelle et accessible.
Née en 1940 dans un milieu social modeste, Annie Ernaux passe son enfance et sa jeunesse en Normandie. Ses parents, ouvriers reconvertis en petits commerçants à Yvetot, rêvent d’ascension sociale pour eux et leur fille.
Agrégée de lettres modernes en 1971, elle enseigne en Haute-Savoie puis s’installe en banlieue parisienne. En 1974, elle fait son entrée en littérature avec « Les Armoires vides ». Elle y raconte l’enfance de Denise Lesur, largement inspirée de son propre vécu. Dès son premier livre, Ernaux revendique une écriture « plate », « sans jugement, sans métaphore, sans comparaison romanesque », dans un style « objectif, qui ne valorise ni ne dévalorise les faits racontés ».
Ecrivaine féministe, Annie Ernaux se considère comme une « transfuge de classe », libre et engagée. Son regard sociologique à la fois critique et distant mêle dans ses récits, ses expériences personnelles à la grande Histoire. Son œuvre croise ainsi la sociologie, l’autobiographie, les droits des femmes et la justice sociale. En 2008, Annie Ernaux se voit décerner le Prix de la langue française pour l’ensemble de son œuvre. En 2014, elle reçoit le titre de docteure Honoris Causa, décerné par l’Université de Cergy-Pontoise.
La Place – Gallimard – 1983
Ce deuxième ouvrage relate l’ascension sociale des parents d’Annie, leurs conditions de travail et leurs espoirs. Annie Ernaux rend hommage à son père qui décède peu après l’obtention de son concours de professeur de lettres. « Je voulais écrire au sujet de mon père, sa vie, et cette distance venue à l’adolescence entre lui et moi. Une distance de classe, mais particulière, qui n’a pas de nom. Comme de l’amour séparé. » Elle obtiendra le prix Renaudot l’année suivante.
Une Femme – Gallimard – 1988
Annie Ernaux retrace la trajectoire de sa mère, décédée de la maladie d’Alzheimer, dans un champ plus vaste, celui de l’histoire de la société. Elle tente de saisir la vie et la réalité de cette femme ainsi que de dessiner le portrait d’une certaine classe sociale. Mise au jour, aussi, de l’évolution et de l’ambivalence des sentiments d’une fille pour sa mère : amour, haine, tendresse, culpabilité, et, pour finir, attachement viscéral à la vieille femme diminuée.
L’évènement – Gallimard – 2000
L’occasion d’un dépistage à Lariboisière replonge Annie Ernaux dans l’attente du verdict du docteur N. en 1963. Quatre ans avant la légalisation de la pilule contraceptive et douze ans avant la Loi Veil, elle décrit le parcours du combattant d’une jeune étudiante pour avorter. Ce livre montre comment une jeune femme jugée trop libre fait face au rejet des médecins, aux regards méprisants, aux tabous ainsi qu’aux préjugés de classe.
Les Années – Gallimard – 2008
Cette vaste fresque sociale qui court de l’après-guerre à nos jours a été récompensée en 2008 et 2009 par de nombreux prix. Le roman balaie 60 ans d’histoire commune avec le récit de l’existence unique de l’autrice, tout en mettant à distance celle qu’elle fut par l’usage de la troisième personne. Une histoire personnelle, impersonnelle et collective.
Mémoire de fille – Gallimard – 2016
« S’appuyant sur des images indélébiles de sa mémoire, des photos et des lettres écrites à ses amies, elle interroge cette fille qu’elle a été. » Annie Ernaux près de soixante ans plus tard, se penche sur l’année de ses 18 ans, l’été 1958. Dans un va-et-vient incessant entre « la fille de 58 » et celle d’aujourd’hui, l’autrice fait part des souvenirs de sa première nuit avec un homme et des répercussions sur la femme qu’elle est devenue.
Photo : Annie Ernaux ©Catherine Hélie, Gallimard.